Le prisonniers du château d’If, Alexandre Dumas renaît à Avignon

Le prisonniers du château d’If, Alexandre Dumas renaît à Avignon

Crédit photo : Emeric Gallego

Spectacle disponible tous les jours à 18h20 au Théâtre des Barriques.

Cette pièce est tirée de l’œuvre d’Alexandre Dumas, Le Comte de Monte Cristo. Elle retrace les années d’emprisonnement d’Edmond Dantès au Château d’If.


Alors qu’après de longues années de captivités, Edmond Dantès sombre peu à peu dans la folie, il fait la connaissance d’un personnage singulier : l’abbé Faria.

Un lien secret et intime va se tisser entre les personnages, rendant leur captivité moins solitaire. Une histoire de transmission durant laquelle nous découvrirons le mystère du trésor des Spada.

La compagnie des Kapokiers joue cette pièce depuis 2013 en France et à l’étranger. Plusieurs fois récompensée, c’est avec une équipe renouvelée que la compagnie fait son grand retour sur les planches.

Une mise en scène sobre signée Gabriel Laborde, dans laquelle il interprète avec brio Edmond Dantès. Une métamorphose époustouflante de Thibault Truffet qui prend plus de trente ans dans son rôle d’abbé.

J’ai rarement pu voir un tel jeu. J’ai été bluffée par cette transformation, une voix et un corps de vieillard dans une enveloppe charnelle de trentenaire. L’inspecteur, interprété par le ténébreux Alexis Chevalier, ponctue l’intrigue de quelques visites. Tantôt défenseur des opprimés, tantôt vieillard fatigué, il apporte au récit une dynamique incontestable. Le Geôlier joué par Arnaud Mattlinger m’a beaucoup touchée.

Sa morosité laisse place sur la fin de la pièce à une douceur et un respect de l’humain insoupçonné. Pas un effet, pas une fausse note pour ces quatre comédiens de talent.


La scène se transforme en prison, où paille, pierres et parchemins font place à l’amitié naissante de nos deux protagonistes. Une création lumière et une scénographie sombres et efficaces. Nous sommes plongés dans l’humidité de cette prison, dont les effluves de tristesse nous transportent.

On assiste durant toute la pièce à une mise en lumière de la condition humaine. Deux hommes privés de leur liberté, pour d’injustes raisons, face à leur solitude. Puis l’Autre arrive comme secours à cette noirceur de l’âme, l’Autre comme échappatoire, comme tremplin vers le savoir et l’amour.



J’ai rarement eu une aussi belle fin de festival. Moi qui suis plutôt adepte des formats courts, je n’ai pas vu passer les 1h25 de spectacle. Des comédiens qui nous donnent à voir la quintessence de l’âme humaine : ses failles, ses forces et son savoir. Un grand merci pour ce vrai moment de spectacle. C’est pour ce genre de pièce que j’aime le théâtre. Chapeau bas les artistes !

Vivante !

Vivante !


Vivante ! c’est tous les jours au théâtre la Scierie à 18h55.

Toi lecteur, derrière ton ordinateur, ton portable ou ta tablette : es-tu à ta place? 

Et si Eve était venue avant Adam ? Non pas pour lui être attribuée mais en tant qu’être unique et singulier ?

“Regarde mon orange, Maman est un albatros, à poil ! Écoute mon orange, Maman fait chanter sa langue et son cul, Maman s’envoie en l’air pour toucher Dieu !”

Vivante, c’est l’histoire d’une femme gâteau sec, qui aurait voulu être une brioche. Un petit bout de femme, d’une puissance rare. Anne Louise de Ségogne, seule en scène avec son arbre et ses fruits défendus, nous conte ce que c’est que d’être une femme. Avoir des désirs, être seule sur Terre, seule créée pour l’homme.

Quelle est sa place : sa place au plateau, sa place dans ce monde de diktats permanent ? On accompagne ce personnage dans sa vie, de ses échanges avec son créateur à sa vie de femme puis de mère. Une belle ode à la vie qui questionne sur le rôle de chacun sur cette Terre.

Une mise en scène drôle et grinçante de Julien Pillot qui donne à Anne Louise toute la latitude pour interagir avec le public. De grands moments de rire mais surtout de questionnement.

Une pièce qui traite de manière singulière de dignité, d’appartenance et de solitude : lorsque la femme, l’humaine au cœur d’un système se retrouve à l’arrêt, à s’interroger sur l’amour de l’autre. 

 
Vivante ! a été pour moi une rencontre, une rencontre avec la femme qui est en moi, une introspection sur ce que je suis. Un beau moment de poésie que je recommande !


Mise en garde : stroboscopes

Nos années parallèles, quand mère et fils se disent adieu

Nos années parallèles, quand mère et fils se disent adieu

Retrouvez nos années parallèles tous les jours à 15h30 au théâtre Episcène.

Une scène, deux univers : d’un côté la mère, de l’autre le fils, tous deux unis par un lien intangible mais pourtant si fort. Nos années parallèles, c’est une partition d’au revoir, jouée au piano par Stéphane Corbin qui accompagne nos deux artistes.

La voix d’Alexandre Faitrouni m’a encore une fois enchantée de délicatesse et de légèreté. Valérie Zaccomer, d’une classe folle, est touchante de sincérité. J’ai décelé une belle complicité entre ces deux comédiens et beaucoup de tendresse, ce qui fait plaisir à voir. 

Une mère qui raconte son enfance, un fils qui découvre sa sexualité : on suit ces deux personnages pas à pas sur le chemin de la vie. Puis vient l’heure de la maladie. On voit le combat d’une femme contre son cancer, et le rôle de soutien infaillible d’un fils qui devient à son tour mère.

Des rôles qui s’inversent, se choquent et s’entrechoquent sur un fond de douceur et de poésie. Un fils qui tombe enfin amoureux, une mère qui part sans regrets : ce sont là deux voies qui se séparent paisiblement. 

Une création lumière de qualité, qui permet au spectateur de visualiser ces deux espaces de vie au plateau. On salue la mise en scène de Virginie Lemoine, qui a sû me faire rentrer dans l’intimité des personnages, sans tourner dans le pathos d’une situation dramatique comme celle de la maladie.


Les deux comédiens restent au plateau, ce qui permet une écoute constante et une belle interaction, le décor est minimaliste et pourtant essentiel : c’est une très belle pièce !

Ce spectacle est une hymne à la vie, un message d’espoir et de douceur.

Ici Loin nous transporte par delà les frontières !

Ici Loin nous transporte par delà les frontières !

Une pièce qui se joue tous les jours à 17h20 au théâtre de l’entrepôt.

Ici Loin c’est une histoire de rencontres, de témoignages recueillis soigneusement pendant trois ans par la Compagnie Mises en Scène. Une rencontre inter-générationnelle, politico-poétique, sur un thème commun : l’avenir.

La pièce commence avec une jeune femme qui semble chercher quelque chose. Elle cherche de manière frénétique, viscérale quelque chose qui semble lui échapper. La clé de cette recherche, elle ne l’a pas encore, elle est en elle. Cinq comédien.nes et une accordéoniste nous partagent des récits, qui s’entremêlent au fur et à mesure. Une quête pour les vivants et les morts d’un terminus, d’un arrêt final sur cette fameuse ligne 14 : à quoi ressemblera le futur?

Une mise en scène très contemporaine signée Michèle ADDALA, accompagnée d’une musicienne de talent Léa LACHAT. Sans fausse note, les protagonistes circulent au plateau, dans une atmosphère de tension palpable de ce questionnement continuel. Un rideau sépare l’avant de l’arrière scène, belle métaphore de cette ligne de bus qui cloisonne et pourtant rassemble.

Une table ronde saisissante entre réel et imaginaire, parcours initiatique, précarité, honte et confidence : Ici Loin est le récit d’une civilisation qui a peur mais qui vit.

Une pièce intime et pourtant rayonnante d’universalité, je ne conseille pas pour des enfants. C’est une pièce assez pointue qui pourra satisfaire les ados et les parents.

Yourte, lorsque la jeunesse se met au vert !

Yourte, lorsque la jeunesse se met au vert !

Retrouvez jusqu’au 25 juillet à 16h30 la Compagnie Les Mille Printemps au Théâtre des Carmes.

Yourte, c’est un rêve d’enfant : le rêve de vivre ensemble, de vivre mieux dans un meilleur environnement.

Tout commence par une promesse : 4 enfants qui se promettent de vivre plus tard dans une yourte, un véritable cocon dans lequel rien ne pourra arriver. Un cocon dans lequel ils pourront vivre, de manière autonome, sans rien pour les aliéner.

Les enfants grandissent et leurs chemins finissent par se séparer… jusqu’au 20ème anniversaire de cette promesse : cette bande d’amis se retrouve enfin, dans une grande yourte, pour échanger, vivre et grandir.

Yourte c’est une histoire de deuil, d’espoir et de rêve. Un rêve assez fou qui nous interroge sur notre société capitaliste, sur consommatrice, à la recherche du toujours plus. Un monde où tout va trop vite, et où les corps et les âmes n’ont même plus le temps de respirer. Est-il l’heure de désobéir, de se réinventer et de construire ensemble le monde de demain ?

Gabrielle Chalmont, la metteuse en scène, confie qu’ “Aujourd’hui j’ai 26 ans et je suis préoccupée.”. Et j’avoue que moi aussi je suis préoccupée par notre monde. Alors, qu’attendons nous pour bouger ? Quel devra être l’élément déclencheur qui nous donnera la force d’arrêter ce massacre ?

J’ai pris une belle claque théâtrale avec cette pièce.Une heure trente de plaisir, de rires et de réflexion. Un jeu d’acteur fin et délicat. Une très belle écoute, et un échange constant avec la salle. Une scénographie travaillée et un très beau décor.

Si vous hésitez encore, je peux vous dire d’y aller les yeux fermés (enfin pas trop non plus sinon vous allez louper la beauté de la pièce).

Mon coup de cœur de ce début de festival !

Mise en garde : stroboscopes